Le récent Cahiers de la Revue Défense nationale, dont la réalisation a été confiée à la 22e promotion de l’École de guerre est intitulé «Penser autrement : pour une approche critique et créative des affaires militaires ». (http://fr.calameo.com/read/00055811533cd3636d191)
Ce copieux cahier, fait le constat qu’« Aucune armée occidentale n’a gagné un conflit récent de contre-insurrection… » ; car, selon le Chef de Bataillon Marc-Antoine Brillant, « le profil non étatique des acteurs du combat leur fait éviter le choc frontal en faisant de l’opinion publique leur champ de bataille. Leur action vise donc à produire sur la durée un effet psychologique de masse pour user et finalement briser la résistance morale de leurs adversaires, quand bien même ceux-ci pourraient être en position de force ».
Et Jean Guisnel de conclure dans le Point ( http://www.lepoint.fr/editos-du-point/jean-guisnel/l-ecole-de-guerre-veut-penser-autrement-17-06-2015-1937178_53.php) : « En quelque sorte, ils (DAESH) ont pensé la guerre autrement ! »
Ont-ils pensé la guerre autrement ou mènent-ils tout « simplement » une « guerre révolutionnaire » comme nous l’avons décrit dans un précédent article (lire : LUTTE-CONTRE L'ORGANISATION ETAT ISLAMIQUE : IL FAUT SE REAPPROPRIER LES CONCEPTS DE LA GUERRE REVOLUTIONNAIRE)
Nous affirmons que cette guerre révolutionnaire n’est ni nouvelle ni une mutation de la conflictualité. Elle n’est qu’un mode opératoire qui démontre une capacité d’adaptation dans un rapport du faible au fort.
Selon la formule du Maréchal FOCH, l’objectif de la guerre « moderne » est (était) de rechercher l’armée de l’ennemi, centre de sa force, et de l’anéantir dans une bataille et qu’il convient donc de détruire les forces organisées de l’adversaire par une bataille décisive.
On voit qu’avec l’OEI ce concept est difficilement applicable car ces derniers « …cherchent avant tout à éviter le choc frontal en faisant de l’opinion publique leur champ de bataille. Tactiquement, ils privilégient l’éparpillement de leurs forces qu’ils compensent par l’emploi de la surprise, de la terreur et du harcèlement… » (CBA M-A BRILLIANT).
Nous sommes bien loin des concepts de la guerre « conventionnelle» édictés par Foch et dont Lawrence dans le désert a bien senti les limites. Comment alors obtenir une supériorité quelconque sur un tel ennemi ?
L’OEI dispose aujourd’hui d’une supériorité idéologique (leur « conviction »), morale (ils sont vainqueurs), financière (ils ont des ressources), humaines (ils ont des hommes) et militaire (nombreux matériels récupérés sur l’ennemi irakien lors de la prise de Mossoul).
Ils n’ont pas, cependant, la supériorité « technologique » (surveillance du champ de bataille, maitrise aérienne, avions et drones) qui nous permet : force de frappe, et renseignement.
Un mode opératoire de lutte contre l’OEI serait de combiner cette supériorité « technologique » avec des actions spéciales sur le terrain sur un mode furtif en mettant en application la même tactique qu’eux ; le décrochage, le refus du choc frontal et en ciblant non les troupes, mais les matériels, les voies de communications.
L’immensité du désert permettant à des troupes aguerries et entrainées pour ce type de combat de ne jamais offrir aucune cible à l’ennemi.
Le corollaire impératif à une telle « tactique » est le Renseignement que la supériorité aérienne et technologique doit nous permettre d’avoir ainsi que la force de frappe permettant de soutenir, d’appuyer ou d’exfiltrer les troupes au sol et de poursuivre ainsi cette stratégie indirecte du refus permanent du choc de la bataille.
Cette stratégie indirecte doit être renforcée par une « guerre psychologique » destinée à toucher l’esprit de la « Nation » qui soutien à l’arrière les troupes engagées et à affaiblir l’état d’esprit de nos ennemis théorisée par Xénophon sous l’appellation de diathétique. Cette « influence morale » est selon Lawrence un des 5 facteurs fondamentaux déterminant la conduite de la guerre.
Enfin, Lawrence s’est persuadé que la guerre « arabe » était géographique et que se battre était une erreur. La victoire dépendant surtout du ratio espace/effectifs et de l’occupation du maximum de territoire. La vitesse et la mobilité étant une condition sine qua none de réussite. La stratégie relevant donc de l’espace plus que de la force, il convient de ne jamais essayer de conserver ou d’exploiter un avantage mais de se mettre rapidement hors de portée pour frapper à nouveau ailleurs.
Ce type de guerre « irrégulière » revient à la définition de Willisen de la stratégie : « l’étude des communications ».
La découverte ou la re-découverte de l’ouvrage de T.E Lawrence ainsi que la dramatique actualité d’aujourd’hui (26 juin 2015 : attentat et décapitation en France à St Quentin Fallavier, attentat en Tunisie à Sousse, attentat au Koweit contre une mosquée Chiite…) nous rappelle, et il ne faut pas le perdre de vue, que la guerre ne se fait pas sans intervention humaine directe et que « La victoire ne peut s’acquérir qu’au prix du sang ». Il parait malheureusement indéniable qu’à terme « on » ne fera pas l’économie d’opérations terrestres.
Rédigé par David HORNUS
David HORNUS est un spécialiste de la sécurité des entreprises, de la gestion des risques et de la négociation de crise.
Il est titulaire d'un 3ème Cycle en "stratégie d'intelligence économique" de l'Ecole de Guerre Économique (1999) et d'un diplôme en "stratégies, analyses et prospectives des mondes méditerranéens" (2022) de l'Université de Toulon.
Expert en intelligence et sécurité économique, il dirige aujourd’hui VIGILANTIS et s'engage depuis plus de 15 ans à préserver les intérêts de ses clients, à les protéger de la criminalité économique sous toutes ses formes.
Négociateur dans le cadre de polices d'assurance "risques spéciaux" pour un leader mondial de la gestion des risques, il a été déployé sur plusieurs dossiers de haute intensité qui l'ont conduit sur les principales zones de crise.
Il est l'auteur d'une " contribution territoriale sur le continuum de sécurité " (juin 2020) et de " Danger Zone : Témoignage d'un professionnel de la gestion de crise " (Balland Mai 2022).
Officier de réserve il est titulaire de la Croix du combattant volontaire pour les opérations extérieures.
Ce copieux cahier, fait le constat qu’« Aucune armée occidentale n’a gagné un conflit récent de contre-insurrection… » ; car, selon le Chef de Bataillon Marc-Antoine Brillant, « le profil non étatique des acteurs du combat leur fait éviter le choc frontal en faisant de l’opinion publique leur champ de bataille. Leur action vise donc à produire sur la durée un effet psychologique de masse pour user et finalement briser la résistance morale de leurs adversaires, quand bien même ceux-ci pourraient être en position de force ».
Et Jean Guisnel de conclure dans le Point ( http://www.lepoint.fr/editos-du-point/jean-guisnel/l-ecole-de-guerre-veut-penser-autrement-17-06-2015-1937178_53.php) : « En quelque sorte, ils (DAESH) ont pensé la guerre autrement ! »
Ont-ils pensé la guerre autrement ou mènent-ils tout « simplement » une « guerre révolutionnaire » comme nous l’avons décrit dans un précédent article (lire : LUTTE-CONTRE L'ORGANISATION ETAT ISLAMIQUE : IL FAUT SE REAPPROPRIER LES CONCEPTS DE LA GUERRE REVOLUTIONNAIRE)
Nous affirmons que cette guerre révolutionnaire n’est ni nouvelle ni une mutation de la conflictualité. Elle n’est qu’un mode opératoire qui démontre une capacité d’adaptation dans un rapport du faible au fort.
Selon la formule du Maréchal FOCH, l’objectif de la guerre « moderne » est (était) de rechercher l’armée de l’ennemi, centre de sa force, et de l’anéantir dans une bataille et qu’il convient donc de détruire les forces organisées de l’adversaire par une bataille décisive.
On voit qu’avec l’OEI ce concept est difficilement applicable car ces derniers « …cherchent avant tout à éviter le choc frontal en faisant de l’opinion publique leur champ de bataille. Tactiquement, ils privilégient l’éparpillement de leurs forces qu’ils compensent par l’emploi de la surprise, de la terreur et du harcèlement… » (CBA M-A BRILLIANT).
Nous sommes bien loin des concepts de la guerre « conventionnelle» édictés par Foch et dont Lawrence dans le désert a bien senti les limites. Comment alors obtenir une supériorité quelconque sur un tel ennemi ?
L’OEI dispose aujourd’hui d’une supériorité idéologique (leur « conviction »), morale (ils sont vainqueurs), financière (ils ont des ressources), humaines (ils ont des hommes) et militaire (nombreux matériels récupérés sur l’ennemi irakien lors de la prise de Mossoul).
Ils n’ont pas, cependant, la supériorité « technologique » (surveillance du champ de bataille, maitrise aérienne, avions et drones) qui nous permet : force de frappe, et renseignement.
Un mode opératoire de lutte contre l’OEI serait de combiner cette supériorité « technologique » avec des actions spéciales sur le terrain sur un mode furtif en mettant en application la même tactique qu’eux ; le décrochage, le refus du choc frontal et en ciblant non les troupes, mais les matériels, les voies de communications.
L’immensité du désert permettant à des troupes aguerries et entrainées pour ce type de combat de ne jamais offrir aucune cible à l’ennemi.
Le corollaire impératif à une telle « tactique » est le Renseignement que la supériorité aérienne et technologique doit nous permettre d’avoir ainsi que la force de frappe permettant de soutenir, d’appuyer ou d’exfiltrer les troupes au sol et de poursuivre ainsi cette stratégie indirecte du refus permanent du choc de la bataille.
Cette stratégie indirecte doit être renforcée par une « guerre psychologique » destinée à toucher l’esprit de la « Nation » qui soutien à l’arrière les troupes engagées et à affaiblir l’état d’esprit de nos ennemis théorisée par Xénophon sous l’appellation de diathétique. Cette « influence morale » est selon Lawrence un des 5 facteurs fondamentaux déterminant la conduite de la guerre.
Enfin, Lawrence s’est persuadé que la guerre « arabe » était géographique et que se battre était une erreur. La victoire dépendant surtout du ratio espace/effectifs et de l’occupation du maximum de territoire. La vitesse et la mobilité étant une condition sine qua none de réussite. La stratégie relevant donc de l’espace plus que de la force, il convient de ne jamais essayer de conserver ou d’exploiter un avantage mais de se mettre rapidement hors de portée pour frapper à nouveau ailleurs.
Ce type de guerre « irrégulière » revient à la définition de Willisen de la stratégie : « l’étude des communications ».
La découverte ou la re-découverte de l’ouvrage de T.E Lawrence ainsi que la dramatique actualité d’aujourd’hui (26 juin 2015 : attentat et décapitation en France à St Quentin Fallavier, attentat en Tunisie à Sousse, attentat au Koweit contre une mosquée Chiite…) nous rappelle, et il ne faut pas le perdre de vue, que la guerre ne se fait pas sans intervention humaine directe et que « La victoire ne peut s’acquérir qu’au prix du sang ». Il parait malheureusement indéniable qu’à terme « on » ne fera pas l’économie d’opérations terrestres.
Rédigé par David HORNUS
David HORNUS est un spécialiste de la sécurité des entreprises, de la gestion des risques et de la négociation de crise.
Il est titulaire d'un 3ème Cycle en "stratégie d'intelligence économique" de l'Ecole de Guerre Économique (1999) et d'un diplôme en "stratégies, analyses et prospectives des mondes méditerranéens" (2022) de l'Université de Toulon.
Expert en intelligence et sécurité économique, il dirige aujourd’hui VIGILANTIS et s'engage depuis plus de 15 ans à préserver les intérêts de ses clients, à les protéger de la criminalité économique sous toutes ses formes.
Négociateur dans le cadre de polices d'assurance "risques spéciaux" pour un leader mondial de la gestion des risques, il a été déployé sur plusieurs dossiers de haute intensité qui l'ont conduit sur les principales zones de crise.
Il est l'auteur d'une " contribution territoriale sur le continuum de sécurité " (juin 2020) et de " Danger Zone : Témoignage d'un professionnel de la gestion de crise " (Balland Mai 2022).
Officier de réserve il est titulaire de la Croix du combattant volontaire pour les opérations extérieures.